LE LEMMING (suite)

Causes de mortalité
Même si certains individus ont vécu jusqu'à trois ans en captivité, aucun lemming ne survit probablement plus d'un hiver dans la nature, la plupart tombant sous la dent des prédateurs sauvages (sauf peut être en période de mortalité massive, où peuvent entrer en jeu d'autres facteurs comme l'inanition). Dans la saison sans neige, les renards arctiques, les hermines, les Harfangs des neiges, les labbes et les Faucons gerfauts réclament leur tribut. Les loups captureront des lemmings à l'occasion, et même les caribous et les poissons ne les dédaigneront pas. Malgré la sécurité qu'offre le manteau nival, plusieurs chercheurs présents dans la toundra durant la fonte des neiges ont découvert des vestiges de nids de lemmings dévastés par des hermines. Des chercheurs ayant passé quatre hivers dans l'île Devon au début des années soixante dix ont constaté que de 5 à 16% des nids de lemmings y avaient été attaqués par des hermines. Le Harfang des neiges, seul oiseau de proie présent en hiver, est mal équipé pour creuser la neige et ne s'attaque qu'aux lemmings s'aventurant à la surface de la neige. Quant au petit renard arctique, il est en mesure de creuser la neige solidement tassée par le vent de la toundra, mais c'est dépenser beaucoup d'énergie pour un maigre repas.
En général, l'activité humaine ne menace pas les lemmings, sauf autour des villages, des mines, des puits de pétrole et des autres emplacements industriels. Le mauvais temps en tue probablement un bon nombre. À l'automne, un temps froid précoce en l'absence de neige peut être fatal; au printemps, durant la fonte des neiges, quand la neige perd son pouvoir isolant, les lemmings peuvent être à la merci des éléments si les conditions se gâtent. On sait que les lemmings souffrent d'un certain nombre de maladies infectieuses et portent divers parasites, mais relativement peu d'individus en meurent.



Importance pour les humains
Les Inuit ne mangent pas de lemming et n'en utilisent pas la peau, vraiment trop petite. Mais les Inuit qui vivent complètement ou partiellement du piégeage profitent directement de la prolifération de renards arctiques qui suit chaque année à lemmings.
Un des noms inuit du lemming variable est kilangmiutak, ou "celui qui tombe du ciel". La légende de lemmings tombant du ciel est commune aux Inuit de tout l'Arctique nord américain et de la Scandinavie. Elle est probablement issue de l'apparition soudaine des lemmings à l'époque de la fonte des neiges après un hiver de reproduction intensive. Les chamans ("sorciers guérisseurs") prêtaient des pouvoirs surnaturels au lemming, et plus particulièrement au lemming variable, auquel ils attribuaient une origine céleste.
Les lemmings constituent un maillon essentiel de la chaîne vitale relativement simple de la toundra, et ils nous aident à mieux comprendre comment même ce simple écosystème peut s'avérer en fait complexe. Les terriers qu'ils creusent transforment le sol arctique. Leurs moeurs alimentaires modifient la composition de la communauté végétale de la toundra. En outre, les trappeurs les apprécient pour une autre raison, car les populations de renards arctiques -- et par conséquent les revenus des trappeurs -- suivent l'abondance des lemmings. L'influence des lemmings se fait sentir bien au delà de l'Arctique. En effet, une baisse de la population de lemmings peut se traduire par une surabondance de Harfangs des neiges, qui, pendant un certain temps, reflueront dans le sud du Canada pour le plus grand plaisir des observateurs d'oiseaux. Pendant ce temps, l'écosystème de la toundra refait ses forces en préparation du déferlement d'énergie qui accompagnera la prochaine année à lemmings.

RÉFÉRENCES :
Banfield, A.W.F.
(1977). Les mammifères du Canada. 2e éd. Presses de l'Université Laval et University of Toronto Press. Pp. 171-173 et 179-183.
Delaunois, A. (1993). Les animaux du Grand Nord. Les éd. Héritage inc. Saint Lambert (Qc). Pp. 38-41.

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